8 avril 2014

Ballerine verte

Elle faisait bien petite à regarder, il y a à peine un an, ma « cai dou shu ». Depuis lors, elle est devenue arbuste et je l’appelle dorénavant ma ballerine verte. Elle se dandine et tourbillonne dans son pot, laisse échapper quelques pas de danse et entrechats dans mon salon, gorgée de soleil toute la matinée, gorgée de lumière qui entoure son visage de poupée de Chine.

Je vois sa tête minuscule entourée de deux bras qui pointent le ciel. Elle caresse le projet de s’envoler vers un grand ailleurs et de m’y entraîner avec elle. Son millier de feuilles m’entourerait pour me protéger et me garantirait un voyage hors du commun où arbres et fleurs seraient rois et reines de troupes multicolores en marche dans des printemps éternels
Je l’observe du coin de l’œil lorsque je médite à ses côtés. Elle me magnétise. Elle est la flamme émeraude qui jaillit hors de son foyer de terre, elle ralentit le temps. Elle lance des mots feutrés qui se détachent en grappe du bout de ses branches pour fermer ensuite la boucle au creux de mes carnets de notes, refuges des pensées secrètes qui m’attristent et m’assombrissent. Je songe à sa sérénité lorsque la douleur m’incommode. Elle me guide, devient mon maître, le sait-elle? Dans le tourbillon des expériences multiples autour de soi et en soi, n’est-il pas avantageux de se voir entouré par ces êtres qui t’apportent courage, force et amour? Une simple présence rassurante et silencieuse ne vaut-elle pas davantage que tous les soins recherchés parmi des milliers de mots apaisants qui jalonnent notre existence mais sans nous toucher?

Ma ballerine verte, mon émeraude dansante tu me dis tellement à travers ton silence que ce serait faute énorme que d’ignorer l’étonnant mystère de ta beauté.